Actualités Algeriennes

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Pour Alger, rejoindre les Brics est le prolongement naturel de sa politique internationale actuelle, qui consiste à se démarquer de ses concurrents régionaux, dont Rabat - ayant consolider son alliance tripartite avec Washington et Tel Aviv -, pour tenter de s’ériger en nouvelle puissance émergente. Une ambition qui n’est pas la bienvenue de la part du seul membre continental et pourtant allié politique du voisin de l’Est : l’Afrique du Sud

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a réitéré, il y a quelques semaines, la volonté de son pays de rejoindre le Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et l’Afrique du Sud), ce club de puissances économiques émergentes, censé rivaliser avec l’autre groupe rassemblant celles établies, le G7 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni). Sur le papier, une pareille adhésion n’est pas, à priori inenvisageable. La Chine, locomotive du groupe, affiche une croissance moyenne de 7 % sur les dix dernières années, l’Inde de 6 %, la Russie de 2,8 %, l’Afrique du Sud de 1,4 % et le Brésil de 1 % seulement. La moyenne de l’Algérie s’établit quant à elle à 2,2 %.

Alger partage également plusieurs points avec les autres membres du groupe en matière de politique étrangère. Son rapprochement avec Moscou et Pékin s’est accéléré ces dernières années, au détriment de ses rapports avec les pays de l’ordre économique classique. Ses relations avec l’Union européenne, particulièrement, se sont détériorées, débouchant parfois même sur des ruptures, tel que c’est le cas avec l’Espagne. Avec la France, la réconciliation tant attendue tarde à se concrétiser et il n’est pas garanti que les minces efforts de Paris lui suffisent à regagner la confiance du régime algérien.

Dans un monde chamboulé par la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine ainsi que ses conséquences mondiales sur l’approvisionnement en énergie et la sécurité alimentaire, Alger souhaite se frayer un chemin parmi les grands de ce monde ayant leur mot à dire sur la scène internationale. Ses récentes initiatives - organisation du sommet de la Ligue arabe contre vents et marées et la constitution d’un G4 africain avec l’Afrique du Sud, le Nigéria et l’Ethiopie - témoignent de cette volonté.

Un pari géostratégique

L’exaucement de celle-ci est toutefois tributaire de sa capacité à se réinventer et s’affranchir de la rente pétrolière et gazière vers une économie diversifiée. Justement, une éventuelle adhésion au Brics lui ouvrirait les portes de nouveaux financements à travers la New Development Bank (Nouvelle banque de développement), fondée en 2014 et dont le siège se trouve en Chine, à Shanghai. Cela permettrait à Alger de fructifier ses échanges commerciaux, d’avoir accès à un système de financement alternatif au dollar américain et à unréseau de règlement interbancaire autre que Swift.

Mais outre les avantages économiques, l’adhésion de l’Algérie au Brics est également motivée par des raisons idéologiques. Tandis que plusieurs pays arabes - dont le Maroc - ont choisi de se rapprocher via les Etats-Unis d’Israël dans le cadre des Accords d’Abraham, la manœuvre algérienne la démarquerait de ses rivaux sur le plan régional. « L’adhésion à ce groupe mettrait l’Algérie, pays pionnier du non-alignement, à l'abri des tiraillements entre les deux pôles », avouait Tebboune à la télévision officielle algérienne fin juillet dernier, ajoutant que cela est « tributaire de conditions économiques auxquelles l'Algérie satisfait en grande partie ».

Le locataire de la Mouradia avait d’ailleurs été invité par la Chine - qui assume cette année la présidence tournante du groupe - à intervenir au sommet du Brics. « Nos expériences passées nous ont clairement montré que le déséquilibre enregistré sur la scène internationale et la marginalisation des pays émergents au sein des différentes instances mondiales de gouvernance, constituaient une source d'instabilité, de manque d'équité et d'absence de développement », avait-il affirmé lors de son intervention par visioconférence, ajoutant que « ces tiraillements nous font rappeler et font remonter à la surface la thèse avancée par l'Algérie, il y a près de 50 ans, sur l'impératif de veiller à l'instauration d'un nouvel ordre économique où règneront parité et équité entre pays ».

Moscou et Pékin, grands frères et parrains ?

Pour le moment, la Chine et la Russie se sont prononcés favorablement (ou presque) sur une adhésion algérienne. « La Chine soutient l'Algérie dans son rôle de présidence tournante de la Ligue arabe et dans la bonne tenue du Sommet arabe et accueille favorablement son adhésion à la famille des Brics », avait indiqué le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, à l’issue de sa rencontre avec son homologue algérien, Ramtane Lamamra en marge de l’Assemblée générale des Nations unies.

De son côté, Moscou dit « ne pas s’opposer » à la volonté de l’Alger. Un ton bien moins enthousiaste que celui de Pékin. « La Russie n’a aucune objection au désir de l’Algérie de rejoindre le groupe Brics, et le président Tebboune a écrit au président Poutine à ce sujet », a révélé l’ambassadeur russe à Alger, Valerian Shuvaev, lors d’une conférence de presse début septembre. D’après le diplomate, la demande de l’Algérie « est acceptée par la Russie, il reste maintenant que les autres pays formant le groupe de Brics se réunissent pour étudier les procédures qui ont trait à l'adhésion de l'Algérie qui est considérée comme un grand pays et aux atouts stratégiques extraordinaires  ». Alors qu’il est attendu en Russie avant la fin de l’année pour signer un partenariat stratégique avec Poutine, sa visite sera-t-elle l’occasion d’annoncer l’adhésion de son pays au groupe, ou, tout du moins, en accélérer la procédure ?

Des réticences de Prétoria

Reste que l'Afrique du Sud va prendre la tête du club de puissances non-occidentales et ce pour an le 1er janvier est réticente à ouvrir les portes, souhaitant rester le seul membre africain de l'alliance, comme le révèle Africa Intelligence.

Depuis le 1er sommet des Brics en 2009, seule Pretoria, sous la présidence de Jacob Zuma, est parvenue - en 2010 - à rejoindre les rangs de ce club informel. Aujourd'hui, de nombreux pays, outre l’Algérie, se bousculent au portillon : l'Argentine et l'Iran notamment ont présenté leur candidature. La Turquie, l'Arabie saoudite, l'Egypte ou encore l'Indonésie sont aussi sur les rangs.

Cyril Ramaphosa a jugé indispensable de « discuter » davantage de cette question avec les quatre autres membres avant de prendre une décision, tandis que sa diplomatie a « exhorté les autres membres à faire une pause » dans les processus d'adhésion afin de s'accorder sur les critères d'entrées.

Pretoria freine aussi des quatre fers craignant de voir son influence s’effilocher. Cyril Ramaphosa préfère plutôt insister sur la nécessité que les pays africains soient mieux représentés dans les instances onusiennes ou au G20 et ce en dépit de l’avis contraire de Pékin qui ne craint pas de partager les financements qui découlent de cette adhésion à condition qu’ils abreuvent son commerce extérieur.

Department Press Briefing – October 7, 2022

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