SM le Roi adresse un Discours au 1er Sommet sino-arabe qui se tient en Arabie Saoudite (Texte intégral) MAP 12 - 16 minutes
Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L'assiste, a adressé, vendredi, un Discours au 1er Sommet sino-arabe qui se tient à Riyad, en Arabie Saoudite.
Voici le texte intégral du Discours de SM le Roi, dont lecture a été donnée par le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch.
"Louange à Dieu, Prière et Salut sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons,
Le Serviteur des deux Saintes Mosquées, le Roi Salmane Ibn Abdulaziz Al-Saoud, Mon Très Cher Frère,
Excellence, Monsieur Xi Jinping, Président de la République populaire de Chine, Mon Grand Ami,
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens d'abord à adresser Mes plus vifs remerciements à Mon Très Cher Frère, le Serviteur des deux Saintes Mosquées, le Roi Salmane Ibn Abdulaziz Al-Saoud, que Dieu le garde, et à travers lui, à Mon Cher Frère, le Prince Héritier, Son Altesse Royale le Prince Mohammed ben Salmane, et au peuple saoudien frère, qui accueille les travaux de ce premier Sommet sino-arabe. Je rends également hommage au travail méritoire accompli par les autorités saoudiennes qui ont veillé à la bonne organisation et à la réussite de ces assises. Que Son Excellence, Monsieur Xi Jinping, Président de la République populaire de Chine, soit également remercié d’assurer la coprésidence de ce Sommet.
J’adresse aussi à Son Excellence, M. Ahmed Aboul Gheit, Secrétaire général de la Ligue des Etats Arabes, l’expression de Ma considération pour l’effort appréciable de la Ligue qui a permis une bonne préparation des travaux du Sommet.
Par ailleurs, Il Nous plait de renouveler nos félicitations au peuple chinois ami pour la réussite du vingtième Congrès du Parti Communiste Chinois. A Notre Grand Ami, Son Excellence le Président Xi Jinping, Nous réitérons Nos félicitations les plus sincères pour sa troisième réélection à la tête du Parti. Ce nouveau mandat atteste de la confiance témoignée à sa personne par le peuple chinois ami et la direction du PCC. C’est aussi l’occasion pour Nous de saluer les conclusions du Congrès ayant trait aux relations avec le monde arabe.
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
Aujourd’hui, nous sommes les témoins privilégiés d’un moment fort dans la dynamique de coopération sino-arabe. En effet, la tenue de ce premier sommet historique constitue un tournant majeur dans les relations solides que cultivent traditionnellement la Chine et le monde arabe. C’est aussi une nouvelle pierre qui est apportée à leur édifice inébranlable.
De fait, ce Sommet est l’occasion d’explorer les perspectives futures d’un partenariat fondateur d’exception, d’autant plus que Nous veillons à lui accorder une place éminente dans la hiérarchie des relations tissées par notre région arabe avec ses partenaires, qu’il s’agisse de pays, de groupements, d’organisations régionales ou internationales. Le Sommet permet aussi de mettre en exergue la portée civilisationnelle de ces liens historiques qui se sont tissés tout au long de l’ancienne Route de la Soie, à la faveur d’interactions humaines dynamiques, de brassages culturels féconds et d’échanges mutuellement bénéfiques.
Ces relations séculaires résultent de métissages culturels et civilisationnels qui se sont maintenus au fil des âges. Tendant une passerelle entre le passé et le présent, elles envisagent le futur sous le signe d’une coopération sans cesse renouvelée, dont l’illustration la plus emblématique est la coopération engagée entre les deux parties dans le cadre de l’Initiative de la Ceinture et de la Route.
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
Outre le lot de crises liées à la pandémie Covid-19, le contexte international qui entoure ce Sommet est dominé par les développements sensibles de la donne géostratégique mondiale, accompagnés de troubles, de tensions et de conflits armés.
Ce concours de circonstances affecte directement notre région arabe, notre partenaire, la Chine, et le reste du monde et il confère, par conséquent, une importance singulière à notre partenariat stratégique, ce mécanisme de coopération dont nous nous prévalons pour relever les défis multiformes auxquels nous sommes confrontés.
La collaboration étroite entre la Chine et le monde arabe a été d’une importance et d’une utilité magistralement illustrées pendant toute la période de la pandémie. En effet, elle a permis de couvrir dans son ensemble tous les aspects de la coopération sanitaire et s’est même élevée, comme dans le cas du Royaume du Maroc, à la hauteur d’un véritable partenariat institutionnel, scientifique et industriel, surtout en matière de vaccins.
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
Nous soulignons avec fierté le souci de la République populaire de Chine amie de soutenir la région arabe dans sa quête de sécurité et de stabilité, de l’aider à dépasser les crises auxquelles elle fait face et à en atténuer les effets. Portée au crédit de la diplomatie chinoise, cette position reflète la sagesse et la pondération qui lui sont reconnues et qui lui permettent de rapprocher les conceptions antagonistes par le recours vertueux au dialogue. C’est, en effet, le moyen le plus sûr pour mettre fin aux turbulences et aux incertitudes qui sévissent dans certains pays arabes frères.
A ce propos, Nous faisons le constat amer que les menaces d’insécurité et d’instabilité qui pèsent sur la région arabe sont parfois imputables aux politiques et à l’attitude affichées par certains pays arabes envers les autres. Aussi, pour conjurer ces nombreux périls, il est absolument nécessaire d’observer les règles de bon voisinage, de respecter la souveraineté nationale des Etats et leur intégrité territoriale, de se garder de toute ingérence dans leurs affaires internes.
Sur un autre plan, le soutien constant de la Chine à la Cause palestinienne juste constitue un acquis international de valeur sur lequel il faut capitaliser pour parvenir à un règlement juste et durable de la question de Palestine, conformément aux résolutions pertinentes de la légalité internationale, au premier chef desquelles celles portant sur Al-Qods Al-Charif.
Dans ce cadre et en Notre qualité de Président du Comité Al-Qods, Nous apprécions hautement le soutien indéfectible de la Chine en faveur de la préservation du statut juridique et historique de la Ville sainte et sa position à l’encontre de toute décision unilatérale qui saperait les efforts visant à relancer le processus de paix, retirerait le dossier d’Al-Qods de l’ordre du jour des négociations et l’exclurait des questions du statut final.
Cela pourrait accentuer les tensions et aggraver encore plus la situation, alors que nous cherchons avec les âmes éprises de paix à réunir les conditions favorables pour que prévale la paix et que Palestiniens et Israéliens retournent à la table des négociations.
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
Les relations sino-arabes se diversifient et évoluent sur les plans politique, économique, commercial, culturel et humain. En effet, elles recèlent un potentiel important qu'il convient de mettre à profit de manière optimale afin qu’elles contribuent à concrétiser les aspirations du monde arabe à un essor économique effectif et à davantage de progrès scientifiques et technologiques, grâce notamment à la réalisation de projets de développement, au renforcement des infrastructures et des équipements logistiques, au développement humain et au transfert de technologie.
La Chine est le premier partenaire économique des pays arabes. Néanmoins, les échanges commerciaux entre les deux parties demeurent en deçà des potentialités existantes, même s'ils ont enregistré des niveaux satisfaisants en termes de volume, de diversité et d'intensité, atteignant environ 240 milliards de dollars en 2020.
La balance commerciale accuse également un déficit considérable en ce qui concerne les exportations arabes vers la Chine (hormis les exportations de pétrole et de gaz). Par conséquent, une action conjointe doit être menée pour les encourager et les diversifier et pour que ces exportations agissent comme un levier essentiel de promotion de l'économie arabe dans les secteurs de l’industrie, de l’agriculture et des services.
Par ailleurs, les touristes chinois dans les pays arabes sont encore moins nombreux que leurs homologues arabes qui choisissent comme destination la République de Chine amie. Aussi, Nous préconisons une action accrue pour une augmentation, de part et d’autre, de leur nombre.
Ainsi, Nous serons plus aptes à concrétiser ce à quoi nous aspirons tous : davantage de rapprochement et d’interaction entre les peuples arabes et le peuple chinois ami.
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
L'un des piliers de la politique étrangère du Royaume du Maroc réside dans le développement de la coopération Sud-Sud, la diversification des partenaires et l'ouverture sur les ensembles régionaux.
En effet, le Royaume entretient des relations d'amitié, de solidarité et de coopération fructueuse avec un grand nombre d'entre eux, notamment ceux appartenant aux pays du Sud.
A cet égard, Nous voudrions exprimer Notre profonde satisfaction pour la forte amitié historique qui lie le Maroc et la Chine. Nous saluons leur coopération fructueuse dans divers domaines ainsi que la coordination et la concertation constructives sur diverses questions d'intérêt commun.
En outre, Nous nous réjouissons de la volonté résolue et sincère que les deux pays partagent pour développer ces relations.
Dans ce contexte, Nous réitérons l’adhésion du Royaume du Maroc à la politique d'une seule Chine, comme base des relations entre les deux pays amis. Notre soutien aux initiatives lancées par la Chine telles que le "Groupe des amis de l'Initiative pour le développement mondial" reflète le niveau de coopération étroite entre les deux pays amis.
Le Maroc souhaite également aller de l'avant dans la consolidation du "Partenariat stratégique" conclu entre les deux pays en mai 2016 et entériné par le "Mémorandum d’entente sur l'Initiative de la Ceinture et de la Route".
Nous ambitionnons ainsi d’élargir les horizons de la coopération bilatérale vers de nouveaux secteurs prometteurs et à forte valeur ajoutée, afin de hisser les relations entre le Royaume du Maroc et la République amie de Chine à des niveaux élevés.
Majestés, Excellences, Altesses,
Mesdames, Messieurs,
Comme il est de coutume dans les forums de coopération qui réunissent la région arabe avec d’autres groupements et pays, le Royaume du Maroc a, dans un esprit constructif et responsable, participé aux nombreuses activités et rencontres fécondes organisées dans le cadre du Forum sur la coopération sino-arabe.
Fort de sa conviction en la nécessité impérieuse de consolider le partenariat stratégique entre la Chine et les pays arabes, il a contribué activement au parrainage et à la réussite des initiatives importantes qui ont été lancées dans ce sens.
Aujourd'hui, le Royaume du Maroc réaffirme sa pleine disposition à concourir efficacement à rehausser le niveau de ce partenariat stratégique, dans tous les domaines, en faisant preuve d’un engagement immuable en faveur des Causes arabes justes et légitimes, et pour qu’émerge un ordre politique et économique mondial plus équitable et équilibré, dans le plein respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale des États et conformément au principe de non-ingérence dans leurs affaires intérieures.
Dans le même ordre d’idées, le Royaume du Maroc salue les initiatives sino-arabes qui seront adoptées lors de ce sommet, et affirme qu’il est disposé à prendre une part active à la mise en application des recommandations qui seront formulées dans la "Déclaration de Riyad".
Le but ultime est de faire avancer le partenariat stratégique sino-arabe, de jeter des bases solides pour construire un avenir commun qui garantisse les moyens de coopération entre les parties, d’encourager l'investissement, de mettre à niveau l'économie et d’améliorer ses performances, de promouvoir les conditions qui permettent au citoyen arabe d’accéder à la société du savoir et de la communication.
Je saisis cette occasion pour exprimer une fois de plus toute Ma fierté pour les relations bilatérales profondes et solides qui existent entre le Royaume du Maroc et le Royaume d’Arabie Saoudite; et Je salue le partenariat exemplaire entre les deux pays, fondé sur la concertation constructive et la solidarité agissante ainsi que sur la coopération fructueuse dans divers domaines stratégiques.
Par ailleurs, c’est pour Moi un motif particulier de fierté les liens de fraternité sincère et de considération mutuelle qui relient les deux Familles Royales, outre les sentiments d’affection et d’amitié que partagent les deux peuples frères.
Pour conclure, Je tiens à renouveler mes sincères remerciements aux dirigeants, au gouvernement et au peuple du Royaume d'Arabie saoudite pour leur bon accueil et Je salue les efforts qu'ils ont déployés pour organiser ce Sommet et assurer son succès.
Ainsi, nous pourrons réaliser ce à quoi nous aspirons tous : consolider les bases d'un véritable partenariat qui sert la paix et la stabilité et favorise l’essor et la prospérité commune.
La pression saoudienne sur l'axe Alger-Teheran se poursuit...
| En ouverture du sommet sino-arabe , le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane, a déclaré que « Les milices et les mercenaires doivent quitter toutes les terres arabes ». https://t.co/Hf6hYVsbOSpic.twitter.com/gkMW3hkSKV
JA: Mohammed VI, Macron et le souffle du colon, par François Soudan :
Au football comme dans les relations bilatérales, Rabat entend désormais faire jeu égal avec Paris.
ÉDITORIAL – Jamais match de football n’aura été aussi attendu au Maroc que celui-ci. Après avoir éliminé l’Espagne, c’est à l’autre de ses deux anciens colonisateurs, la France, que les Lions de l’Atlas se mesureront le 14 décembre, à Doha, en demi-finale de la Coupe du monde, avec ce supplément d’âme que seule l’Histoire peut accorder.
Même si le Protectorat français n’a, à aucun moment, étouffé un sentiment national et une conception de la marocanité reposant sur le triptyque Dieu-Patrie-Roi et sur le sang versé transmis par hérédité, il n’en fut pas moins une profonde servitude sur laquelle toute revanche est bonne à prendre, sans rancœur ni amertume. Surtout lorsque les Marocains croient encore sentir dans leurs complexes relations avec la France un peu du souffle de ce que Lyautey appelait « l’odieux muflisme du colon ».
Les pluies de décembre et le parcours glorieux des Lions de l’Atlas ont redonné le sourire des jours heureux aux habitants du royaume chérifien. Une douce euphorie mêlée de fierté, éphémère certes, mais aussi réconfortante qu’un iftar au soir d’un long jeûne.
Le temps de l’indifférence
Dans cette ambiance quasi extatique, l’agrément donné le 5 décembre par Rabat au nouvel ambassadeur de France au Maroc, Christophe Lecourtier, suivi de l’annonce de la visite prévue les 15 et 16 décembre de la ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna, sont passés quasiment inaperçus. Depuis plus d’un an, en effet, le couple franco-marocain bat de l’aile. Au temps des scènes de ménage a succédé celui de l’indifférence.
Paris – et en particulier l’Élysée – a-t-il pris la mesure de l’ampleur d’un phénomène qui a dépassé le stade d’une simple crise bilatérale, comme les deux pays en ont connu depuis l’affaire Ben Barka, pour s’installer dans le structurel ? Rien n’est moins sûr.
À en juger par le nombre extrêmement réduit de personnalités qui, tant en France qu’au Maroc, s’emploient à renouer les fils d’une relation jadis exemplaire, l’heure n’est plus aux émotions partagées. Face à ce qu’ils perçoivent – au mieux – comme l’expression d’une désinvolture française à leur égard, les Marocains réagissent désormais par une forme de désintérêt.
Entre autres incompréhensions (lesquelles, vues de Rabat, sont autant de vexations), celle issue de la décision unilatérale prise par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin de réduire de façon drastique le nombre de visas a été accueillie avec froideur par les autorités chérifiennes. Décidée sans consultation préalable et présentée par son auteur comme une quasi mesure de rétorsion, cette disposition parait d’autant plus maladroite qu’elle touche en priorité la couche francophone et francophile de la société marocaine : universitaires, artistes, entrepreneurs, acteurs de la société civile et même personnalités politiques, le cas de l’ex-ministre de l’Intérieur, secrétaire général du Mouvement populaire et président du Conseil régional de Fès-Meknès, Mohand Laenser, étant à cet égard emblématique.
Maladroite, contre-productive et finalement sans autre effet que d’alimenter un sourd sentiment anti-français, puisque les consulats d’Espagne, d’Italie et d’Allemagne au Maroc offrent sans restriction des visas Schengen aux VIP privés du sésame français.
Visite d’Emmanuel Macron ?
« Nous aurions pu réagir à l’algérienne, en rappelant les crimes commis sous le Protectorat, la guerre du Rif, la sanglante répression des manifestations de Casablanca en décembre 1952, les morts et les torturés de l’Armée de libération et du Mouvement national, explique un ministre rencontré à Rabat. Mais culpabiliser la France et faire son procès ne nous intéresse pas. Nous sommes une monarchie multiséculaire, et l’occupation coloniale n’a été qu’une parenthèse dans notre Histoire. Ce que nous disons aux dirigeants français est simple : ne croyez surtout pas que le Maroc vous est acquis et que l’amitié ne s’entretient pas. Nous n’avons pas besoin de vos déclarations d’amour, nous voulons juste voir en vous un interlocuteur fiable – et nous avons des doutes sur ce point. À vous de les dissiper. »
« Times are changing » chantait Bob Dylan. Entre le Maroc et la France, les temps changent aussi. Même si les intérêts économiques français dans le royaume ne sont pour l’instant pas concernés par cette désaffection, Catherine Colonna, dont le séjour mi-décembre est censé préparer une visite officielle d’Emmanuel Macron en janvier 2023, se rendra vite compte que ses interlocuteurs n’ont plus grand-chose à voir avec ceux qu’elle a connus lorsqu’elle travaillait aux côtés de Jacques Chirac, le plus « marocophile » de tous les chefs d’État de la Ve République.
Paris n’est plus leur horizon exclusif et les lycées français – dont ils sont unanimes à déplorer la baisse de niveau – le lieu de scolarisation privilégié de leurs enfants. Un cycle s’achève, un autre commence dans la relation franco-marocaine. C’est sans en informer la France ni prendre son avis que le roi Mohammed VI a négocié et conclu il y a deux ans son « deal du siècle » avec les États-Unis et Israël, et c’est sans la participation de l’ex-puissance coloniale que se tiendra, sans doute en mars prochain, à Dakhla, la seconde édition du sommet du Néguev réunissant les signataires des Accords d’Abraham. Un glissement de terrain géopolitique qui s’accompagne d’une exigence clairement formulée il y a quatre mois par le souverain à l’égard de la France : celle d’un nouveau narratif sur le Sahara.
C’est à cette aune, prioritaire pour le Maroc, que sera jugée, vu de Rabat, la réussite ou l’échec de la visite du président Macron. « Le discours français qualifiant notre plan d’autonomie de “solution crédible” date de 2007 et il est désormais obsolète. L’Espagne, l’Allemagne, les États-Unis ont évolué en tenant compte des réalités du terrain, la France doit suivre. Si elle reste figée, cette visite ne servira à rien. Il vaudrait mieux qu’elle ne se tienne pas », confie un haut responsable au cœur du dossier. Discussions en cours sur le Sahara
Selon nos informations, des discussions sont en cours sur ce point précis depuis plusieurs semaines entre le conseiller diplomatique du président français, Emmanuel Bonne, et ses interlocuteurs marocains pour que le « wording » officiel de Paris repose désormais sur une formulation du type « la solution la plus crédible » ou « la base d’une solution crédible », ce qui constituerait un indéniable progrès – mais aussi, vu cette fois d’Alger, une indéniable régression. Car l’essentiel du problème est là : très engagé dans la « refondation » de la relation franco-algérienne, Emmanuel Macron prendra-t-il le risque de mécontenter un partenaire qui, bien que n’étant pas officiellement partie au conflit de l’ex-Sahara occidental, est en réalité partie prenante et omniprésente ?
N’eût été le poids et les pressions de l’Algérie, il y a longtemps que la France aurait reconnu la marocanité des « Provinces du Sud », c’est une évidence. Mais le climat de tension entre la vieille monarchie et la jeune république sur fond d’orgueil partagé est tel – au point que les médias officiels algériens ont reçu pour consigne de passer sous silence les performances de l’équipe marocaine de football lors de la Coupe du monde – que le moindre signe d’une évolution de la position française sur le Sahara en faveur du Maroc sera immédiatement suivi par un raidissement, voire des mesures de représailles d’Alger à l’encontre de Paris. Emmanuel Macron le sait. Lui qui souhaite rester dans l’Histoire comme le président refondateur de la relation franco-algérienne après avoir réconcilié les mémoires des deux pays osera-t-il prendre ce risque ?
Longtemps enclins à une certaine compréhension vis-à-vis du dilemme français, les dirigeants marocains, Mohammed VI en tête, ont changé de ton. Depuis la reconnaissance américaine – qui n’a pas été remise en cause par l’administration Biden – de la marocanité du Sahara occidental, suivie par l’évolution significative des positions de l’Espagne et de l’Allemagne, l’heure est au « qui n’est pas avec nous est contre nous ».
Si cette attitude de fermeté n’est pas systématiquement appliquée aux relations que le Maroc entretient avec chacun de ses partenaires (la Chine, la Russie, la Turquie, entre autres, y échappent), la France, elle, est clairement visée. « L’Espagne est bien parvenue, au terme d’un bras de fer, à faire comprendre à l’Algérie que les relations bilatérales devaient être dissociées du dossier du Sahara. Pourquoi la diplomatie française n’y parvient-elle pas ?, s’étonne l’un de mes interlocuteurs. Pourquoi est-elle tétanisée par ce qui n’est qu’une posture de chantage ? Et pourquoi cette extrême frilosité des entreprises françaises à investir dans nos provinces du Sud, y compris l’Agence française de développement, qui n’y a engagé aucun programme ? »
Fini, l’effet « Mamounia »
Même si elle n’attend rien de Paris à ce sujet – une médiation française entre les deux frères ennemis du Maghreb relevant de la mission impossible –, la partie marocaine entend également faire part à l’Élysée et au Quai d’Orsay de sa vive préoccupation quant à l’augmentation vertigineuse des dépenses militaires algériennes. Vu de Rabat, l’équation est simple en effet : l’exécutif algérien ne comporte que deux tendances, celle qui voue au Maroc une hostilité déclarée avec pour chef de file le chef d’état-major de l’armée, Saïd Chengriha, et pour porte-parole le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, et celle qui, à l’instar du président Abdelmadjid Tebboune, voue au royaume une hostilité tout aussi tenace, mais masquée par la nécessité de tenir un discours plus diplomatique.
Il serait donc bon qu’Emmanuel Macron le sache avant de se rendre dans le royaume – et sans doute le sait-il : pour les Marocains, la France n’est plus indispensable. Pour la classe dirigeante française aussi, l’époque de « l’effet Mamounia », quand il n’y avait rien de tel pour flatter un républicain, qu’il soit de droite ou de gauche, que les fastes de la monarchie, est révolu. C’est maintenant intérêts contre intérêts, avec tout ce qu’une alliance implique comme obligations réciproques. Un double désamour qui peut être bénéfique s’il fonde une nouvelle relation, adulte, dépassionnée, professionnelle et stratégique. Après tout, sur le terrain, Coqs gaulois et Lions de l’Atlas respectent les mêmes règles, s’affrontent et puis s’embrassent. Qui a dit que le football était la continuation de la politique par d’autres moyens ?
''« la solution la plus crédible'' est LA seule formulation acceptable , la seconde ''la base d’une solution crédible '' c'est du surplace car le ''d'une'' est trop vague à mon gout et de plus elle est aussi sournoise que la position Française actuelle (voire plus qu'elle donne une impression d'avoir lâché quelque chose)...Quel que soit la position de la France au sujet du Sahara notre prise de distance avec la France est souhaitable, pour plusieurs raison et la première c'est que le monde est aujourd'hui régis par les règles anglo-saxonnes ...
_________________ Le courage croît en osant et la peur en hésitant.
Fahed64, Shugan188, Socket-error et replaysat aiment ce message
Fahed64 Administrateur
messages : 25558 Inscrit le : 31/03/2008 Localisation : Pau-Marrakech Nationalité : Médailles de mérite :
Merci pour l'article, si la France fait évoluer ses éléments de language c'est une trés bonne chose Aprés, la France est et reste un membre du Conseil de Sécurité, la 7eme économie du monde et la 4eme armée du monde. C'est une grande puissance et la Maroc en a besoin, d'ailleurs l'article montre que les dirigeants marocains cherche l'aide de la France face au surarmement algériens. le Maroc aura encore et toujour besoin de la France comme la France aura encore et toujour besoin du Maroc
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Fox-One General de Division
messages : 8039 Inscrit le : 20/09/2007 Nationalité : Médailles de mérite :
La visite n'a simplement pas lieu d'être. Nous n'avons pas à plier face à ce qui n'est plus qu'une puissance secondaire.
Je constate que la Maroc n'a toujours pas désigner le nouvel ambassadeur à Paris, alors qu'eux nous envoient un vendeur de voiture d'occasion.
Je pense qu'il faut se concentrer sur d'autres partenaires et faire notre petit bout de chemin en laissant la France sombrer dans la guerre civile que ses media de droite semblent esperer avec délectations.
Oui Alpha d'autant plus que si on gagne le match on partira avec un ascendant psychologique.
Déjà au yeux des africains le fait que nous sommes la aujourd'hui c'est pas un hazard juste une évidence tellement nous sommes l'un des moteurs du continents.
_________________ Sois généreux avec nous, Ô toi Dieu et donne nous la Victoire