Ira ou n’ira pas ? À mesure que s’approche la plénière inaugurale, la question de la présence effective du roi Mohammed VI au sommet de la Ligue arabe, prévu les 1er et 2 novembre prochain à Alger, se pose avec de plus en plus d’acuité. Les conjecturations ont été relancées le 27 septembre, lorsque l’Algérie a fait parvenir le carton d’invitation du Maroc.
Ce jour-là, sur “hautes instructions royales”, plutôt que son homologue marocain, c’est le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita qui a reçu en personne l’émissaire du président Abdelmadjid Tebboune. Une marque de considération pour le ministre de la Justice Abderrachid Tabi qui a porté l’enveloppe scellée contenant l’invitation adressée au roi Mohammed VI. Mais, pouvait-il en être autrement ?
Invitation obligatoire
“L’invitation envoyée par l’Algérie au Maroc est une pratique obligatoire. Tout pays organisateur d’un sommet de la Ligue arabe est tenu d’envoyer une invitation à tous les pays membres de cette organisation. Ce n’est donc clairement pas un choix de l’Algérie, mais une décision de cet organisme pour que le sommet se tienne dans les conditions acceptables”, clarifie Mustapha Tossa.
“Cette invitation était tout à fait attendue puisque les règles et la pratique institutionnelle imposent qu’une invitation signée par le chef de l’État du pays organisateur soit envoyée à tous les chefs d’État des pays membres”, complète le journaliste et éditorialiste.
Après la nouvelle main tendue du roi Mohammed VI dans son discours à l’occasion de la Fête du Trône, cette invitation algérienne avait pu laisser penser à un début d’apaisement des relations entre les deux voisins. Surtout depuis que nos confrères de Jeune Afrique, citant des sources “très bien informées”, ont affirmé que le roi Mohammed VI “prendra part personnellement” au 31e sommet de la Ligue arabe.
“L’information fuitée de la présence effective du roi Mohammed VI à ce sommet est pour moi une sorte de feu vert donné aux deux États profonds du Maroc et de l’Algérie pour aboutir à un gentlemen agreement ou à une réconciliation. Si entre-temps ce début de réconciliation avait été atteint, cela aurait nécessité la présence à Alger du roi”, revient encore Mustapha Tossa.
La remise à plat des relations Maroc-Algérie devra encore attendre
Les premiers doutes sont très vite apparus. La remise à plat de la rivalité maroco-algérienne devra encore attendre. D’abord parce le porteur de l’invitation adressée au roi est un personnage sans véritable rang protocolaire dans les sphères décisionnelles de l’Algérie officielle. De plus, sans attendre le déjeuner ni le thé de bienvenue, l’émissaire est reparti de Rabat sans demander son reste.
“Ce qui est encore plus incompréhensible c’est que l’émissaire algérien n’ait pas fait preuve de plus d’empathie vis-à-vis de son hôte marocain ou même de montrer que les relations diplomatiques sont gérées de manière intelligente”, analyse Mustapha Tossa. “Le régime algérien montre qu’il est dans une logique de show diplomatique, démontrant par là une agressivité obsessionnelle et une animosité atavique. Au-delà, cela montre aussi que le régime algérien ne veut pas que le Maroc sorte de son statut attribué d’ennemi éternel”, poursuit l’éditorialiste.
Ensuite, la présence du roi Mohammed VI lors de sommets internationaux n’est effective seulement lors de tournants diplomatiques majeurs pour le royaume comme le retour du Maroc dans l’Union africaine (UA) en 2017. Selon les informations de TelQuel, le roi Mohammed VI ne se rendra pas au prochain sommet arabe. Faut-il y voir une volonté de protéger l’image royale en territoire hostile ?
“Tous les indicateurs actuels montrent que l’Algérie semble s’être agrippée à son animosité envers le Maroc et n’est pas disposée à ouvrir une nouvelle page avec son voisin. Dans les conditions actuelles, courir le risque de conditions dégradantes voire insultantes ne vaut pas le coup que le roi se déplace à Alger”, prolonge Mustapha Tossa.
Les pistes Moulay Hassan ou Moulay Rachid
Si officiellement le Maroc se garde de révéler les noms de ses représentants à Alger, le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, et le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, deux personnalités importantes dans la préséance marocaine, devraient suppléer l’absence du souverain, toujours selon nos informations.
Toujours est-il que des rumeurs persistantes font circuler d’autres pistes. Le prince Moulay Rachid par exemple pourrait représenter le roi à cette réunion au sommet, comme il l’a fait récemment lors des funérailles de la reine Elisabeth II, ou même de sommets arabes comme celui de 2019 à Jeddah. Encore plus improbable, l’hypothèse que le roi pourrait envoyer le prince héritier Moulay Hassan pour le remplacer a aussi ses défenseurs.
“Cela serait un acte fort puisque ce serait sa première grande sortie sur la scène internationale de manière politique et diplomatique. Mais pour l’heure, personne n’a pas vraiment d’idée sur la décision finale que prendra le royaume sur ces questions”, conclut Mustapha Tossa.
Apparement selon Telquel (qui est très affirmatif) Sa Majesté n'ira pas à Alger...En attendant d'ici là les Algériens (et moi-même je l'avoue) vont devenir fous....J'espère que ni Sa Majesté , ni le prince héritier ni Moulay Rachid n'irons dans ce zoo à ciel ouvert..Akhennouch fera l'affaire sinon Batman à l'habitude des pingouins
_________________ Le courage croît en osant et la peur en hésitant.
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Fahed64 Administrateur
messages : 25558 Inscrit le : 31/03/2008 Localisation : Pau-Marrakech Nationalité : Médailles de mérite :
Franchement Ssi Fahed même Bourita ne devrait pas y aller on sait jamais avec ces gens,Akhennouch o baraka 3lihoum...
Envoyer Akhenouch signifierait quand n'accorde bcp d'importance à leur truc, le chef du gouvernement et la 2ème personnalité dans l'hiérarchie constitutionnelle. Faut envoyer Bourita, ils sont obsédé par lui à Alger
Socket-error General de Division
messages : 6821 Inscrit le : 03/04/2016 Localisation : ... Nationalité : Médailles de mérite :
Soit le Roi y va pour une visite expresse de quelques heures car c'est leur hantise, ou alors on envoie Si Hilale ou un fonctionnaire du ministère des AE
_________________ لك الله ياوطني
simplet General de Brigade
messages : 3204 Inscrit le : 20/05/2012 Localisation : MONTREAL Nationalité : Médailles de mérite :
la direction de la chaîne française #CNEWS annule à la dernière minute une intervention programmée avec #Ferhat_Mhenni une vidéo des coulisses montre un journaliste de la chaîne expliquer ne rien comprendre aux raisons de cette annulation… pic.twitter.com/Mtet8p8xkk
Ts ces médias qui déversent leur haine appartiennt à des milliardaires Bollore pr Canal Cnews tribune de Zemmour, Bouygues pr TF1 LCi, Drahi pr Bfm sans compter les médias papiers entre les mains de Lagardère, Niel ce qui donne la même chanson sur le covid, la guerre en Ukraine, l'immigration, l'islam... La censure s'était tjrs faite en secret mais là ils s'en cachent plus.
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simplet General de Brigade
messages : 3204 Inscrit le : 20/05/2012 Localisation : MONTREAL Nationalité : Médailles de mérite :
Sujet: Re: Diplomatie marocaine - Relations internationales Mar 4 Oct 2022 - 0:13
Il y a un passage ou farhat mhenna dit clairement au responsable de la cnews que le régime algérien a appelé l'Élisée qui a fait pression sur la chaîne. No comment.
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RED BISHOP Modérateur
messages : 12323 Inscrit le : 05/04/2008 Localisation : france Nationalité : Médailles de mérite :
Sujet: Re: Diplomatie marocaine - Relations internationales Mar 4 Oct 2022 - 18:11
Effectivement l'évolution des positions de l'Allemagne et des Pays-Bas fait boule de neige en Europe Occidentale. Le Luxembourg a logiquement suivi. Maintenant j'attends la position de la Belgique.
Sujet: Re: Diplomatie marocaine - Relations internationales Mar 4 Oct 2022 - 19:46
JA: Maroc-France : la fin d’une relation privilégiée Entre ces deux-là, le mot « crise » est toujours tabou. Les signaux d’un malaise persistant entre Paris et Rabat sont pourtant de moins en moins faibles:
FRANCE – MAGHREB : L’ÉQUATION IMPOSSIBLE (2/4) – En juin et juillet derniers, puis à nouveau début septembre, le roi Mohammed VI passait plusieurs semaines en France. Deux mois durant lesquels le monarque, venu au chevet de sa mère que l’on dit souffrante, a séjourné essentiellement à Paris, dans une de ses résidences acquise en 2020 : un hôtel particulier situé dans le 7e arrondissement, derrière le Champ de Mars. Soit à deux pas de l’Élysée.
Pourtant, comme l’ont confirmé plusieurs sources consultées par JA, à aucun moment le souverain marocain et le président français ne se sont vus, ni appelés au téléphone.
Pas même un message protocolaire de prompt rétablissement n’a été adressé par Emmanuel Macron au roi du Maroc lorsque ce dernier, pendant cette période, a contracté le Covid – ce qu’il n’avait pas manqué de faire lorsque le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, était tombé malade, en octobre 2020. De son côté, Mohammed VI n’avait pas omis d’envoyer ses vœux de bonne santé au locataire de l’Élysée lorsque celui-ci avait été déclaré positif au coronavirus en décembre 2020.
Autant de marques d’une relation qui bat de l’aile entre les deux chefs d’État. Ce qui est plutôt un euphémisme, à en croire un ancien haut diplomate français, qui la qualifie, lui, d’« exécrable ».
Le grand malentendu
« Contrairement à ce que la France et le Maroc veulent laisser croire, il ne s’agit pas uniquement de tensions récentes autour du Sahara, ou de l’affaire des écoutes téléphoniques via le logiciel Pegasus, que Macron aurait prise comme un affront personnel, malgré les démentis du Maroc, et qu’il n’aurait toujours pas digérée, ou du contentieux sur les visas », assure cette même source.
C’est en réalité un mille-feuille d’incompréhensions entre Paris et Rabat depuis le premier mandat d’Emmanuel Macron. Après la présidence Hollande, la relation est passée de fraîche à glaciale.
Comment en est-on arrivé là ? À Rabat comme à Paris, tous soulignent l’absence de sensibilité marocaine du président français. Jusqu’à son élection en 2017, son seul contact avec le Maroc se résumait au deal Lesieur Cristal (filiale du holding royal SNI) dont il avait en partie orchestré la vente en 2011 au groupe Avril, quand il était encore banquier chez Rothschild.
Il y a aussi ces vacances passées à Tanger dans la demeure de son mentor, le milliardaire Henry Hermand – un des premiers et plus ardents soutiens de Macron, que cet homme d’affaires épris de politique (et à qui de nombreux hommes politiques, Michel Rocard en tête, étaient redevables) avait pris sous son aile dès 2002. Et il y a enfin l’amitié de son épouse Brigitte pour l’artiste-peintre marocain Mehdi Qotbi.
Désinvolture
« J’ai connu Macron bien avant qu’il ne soit au pouvoir », raconte l’écrivain franco-marocain Tahar Ben Jelloun, ami de longue date d’Henry Hermand. « Bien qu’il connaisse mal le Maroc, il n’a jamais donné suite à mes propositions de lui faire découvrir le pays et son fonctionnement. Et, de toute évidence, il n’a trouvé personne pour le conseiller à ce propos, au vu de la désinvolture avec laquelle il aborde le sujet », assure-t-il.
Aux yeux du prix Goncourt 1987, connu pour sa proximité avec le Palais, la manière dont le président français a annoncé sa venue au Maroc fin octobre, en réponse à des passants, un soir d’août à la sortie d’un concert de musique électro au Touquet, est révélatrice de sa méconnaissance des us et coutumes marocains, et diplomatiques plus généralement.
D’ailleurs, l’Académicien estime – il l’a écrit dans une tribune publiée sur un site d’information marocain – que « cette annonce est fausse. Macron n’a pas été invité au Maroc ni pour la fin du mois d’octobre ni pour après ».
De son côté, le ministère marocain des Affaires étrangères n’a ni confirmé ni infirmé un quelconque voyage présidentiel au Maroc. Et près de deux semaines après la diffusion sur les réseaux sociaux de cette vidéo filmée par des badauds en marge du Touquet Beach Festival, la visite n’a toujours pas été inscrite à l’agenda officiel du président français.
Une source élyséenne a tout juste déclaré à JA que « des négociations [étaient] en cours avec les autorités marocaines ». Elles porteraient sur le format de la visite, ainsi que sur la date. Autant dire que le projet est encore dans les limbes…
Nouvelle génération
« À moins de vouloir verser dans une forme de jeunisme digital, ce qui est très risqué avec un pays comme le Maroc, cette annonce de Macron, qui survient quelques jours à peine après son retour de voyage en Algérie, a tout d’un ballon d’essai », souligne un essayiste politique français.
Si la pratique de la Ve République a fait de la politique étrangère le domaine réservé de la présidence, c’est encore plus vrai sous Emmanuel Macron. C’est à l’Élysée que se prennent les décisions, ce qui réduit parfois le Quai d’Orsay à l’expédition des affaires courantes. Une évolution illustrée par le nombre toujours plus faible de diplomates arabisants au profit de profils technocratiques.
Une nouvelle génération de diplomates et de conseillers qui, à la différence de ceux qui entouraient les anciens présidents français de la Ve République, n’ont pas toujours la stature d’un Dominique de Villepin ou d’un Hubert Védrine.
Des critiques qu’on a souvent entendues au sujet par exemple d’Hélène Le Gal, l’ambassadrice envoyée en 2019 pour représenter la France dans le royaume et qui vient d’y achever sa mission.
« Au même titre que Washington ou Londres, Rabat a toujours été l’une des chancelleries les plus convoitées par les diplomates français, et la France, au regard de la relation privilégiée qui unit les deux pays, a toujours veillé à soigner les profils qui y sont envoyés, commente Tahar Ben Jelloun. Y placer une personnalité froide comme Hélène Le Gal montre que Macron ne comprend pas bien le Maroc, ou qu’il estime que ce n’est pas un pays stratégique. »
Sentiment antifrançais
Si les ambassadeurs ne décident pas de la ligne globale entre les deux pays, ils sont chargés de l’entretien des relations au quotidien. Or durant ses trois années en poste au Maroc, l’ex-« Madame Afrique » de François Hollande n’a pas réussi à se constituer un réseau parmi les élites marocaines ni à se faire apprécier par ses interlocuteurs au royaume, contrairement à son prédécesseur Jean-François Girault.
« Elle a cumulé les maladresses dans les médias locaux comme sur les réseaux sociaux, dans un contexte où, dans sa volonté de plaire à l’électorat de droite, Macron a réduit de moitié le nombre de visas accordés aux Marocains, avec des refus de demandes d’anciens ministres, d’universitaires, de PDG… Résultat, les Marocains qui se rendaient jusqu’alors en France pour étudier, voir leurs familles, faire du tourisme ou du commerce se tournent vers d’autres destinations pour dépenser leur argent. Et, surtout, cela alimente dans toutes les couches sociales un sentiment antifrançais jusqu’alors inexistant au royaume », explique l’auteur de La Nuit Sacrée.
Cette absence de tropisme d’Hélène Le Gal pour le Maroc est le reflet de celui de l’actuelle ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, de son prédécesseur Jean-Yves Le Drian ou même de Patrick Durel, le conseiller diplomatique du président Macron pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient.
De leur côté, le royaume et son ambassadeur en France, Mohamed Benchaâboun, n’ont pas réussi à constituer de nouveaux relais, à l’instar de ce que peuvent représenter pour l’Algérie la productrice Yamina Benguigui ou l’écrivain Kamel Daoud.
Mohamed Benchaâboun, en février 2020, à Rabat. MOHAMED DRISSI KAMILI pour JA
Le Sahara, grand sujet de discorde
Un point relevé d’ailleurs par Zakaria Garti, le président de Maan (mouvement citoyen marocain d’inspiration libérale, proche de personnalités de LaREM), dans un post en arabe sur Twitter publié le 12 septembre en réaction à la réception par le député français Jean-Paul Lecoq (Parti communiste) d’une délégation du Polisario à l’Assemblée nationale : « La montée de Macron s’est accompagnée de l’émergence d’une nouvelle technocratie qui n’a aucune connaissance des relations politiques historiques entre les deux pays », écrit-il. À cela s’ajoute, dit-il, « la faiblesse, côté marocain, d’une diplomatie parallèle et l’absence de relais au sein du nouvel establishment ».
Reste le grand sujet de discorde : le Sahara, « le prisme à travers lequel le Maroc considère son environnement international, et l’aune qui mesure la sincérité des amitiés et l’efficacité des partenariats qu’il établit » a explicité le roi Mohammed VI dans son discours du 20 août.
Un discours où il a appelé les amis traditionnels du Maroc qui ne l’auraient pas encore fait à clarifier leur position sur ce sujet, et qui a largement été interprété comme un message adressé à la France, cette dernière étant le deuxième partenaire économique du Maroc, après l’Espagne.
Or la France, dans une volonté de ménager l’Algérie – soutien historique, militaire, financier et diplomatique du Polisario – n’affiche pas de position tranchée comme celle qu’ont pu prendre récemment des pays comme l’Allemagne, les États-Unis ou encore l’Espagne.
Paris s’en tient au même discours depuis 2007, qualifiant la solution marocaine de « crédible « . Ce qui, vu de Rabat, reste insuffisant puisque le royaume aimerait voir qualifié le plan d’autonomie sous souveraineté marocaine de « solution la plus crédible ». En diplomatie comme en amour, les plus petits détails comptent. Orgueil et préjugés
« Emmanuel Macron n’apprécie pas du tout de sentir que Rabat lui force la main ou lui fait du chantage. Paris n’ira pas plus loin sur la question du Sahara, car il considère que la France a déjà une position positive par rapport à ce dossier et ne comprend pas ce que le Maroc veut de plus. Surtout, Macron a à cœur de consolider sa relation avec Alger. Pour plusieurs raisons, mais surtout car il aimerait rester dans les mémoires comme le président qui aura résolu la sempiternelle question algérienne, à laquelle tous les présidents de la Ve république se sont attelés, sans succès. La question algérienne, pour Paris, relève quasiment de la politique intérieure, au regard de la présence d’une importante diaspora algérienne en France, mais aussi parce qu’elle est très scrutée par l’opinion publique française du fait de l’histoire entre les deux pays », explique une de nos sources.
À ce « grand malentendu » sur le dossier du Sahara s’ajoutent une certaine préoccupation française quant à l’influence grandissante du Maroc en Afrique subsaharienne ainsi que la diversification par Rabat de ses partenariats stratégiques, avec des pays comme Israël, les États-Unis, l’Allemagne ou encore l’Espagne.
Mais pour le moment, realpolitik oblige, le business continue, et la coopération sécuritaire se poursuit, et une attitude de froide courtoisie est de mise des deux côtés. D’ailleurs, les uns et les autres se refusent toujours à évoquer ouvertement une « crise ». Jusqu’à quand ?
ZATOICHI.., Fahed64, RED BISHOP, Jihad, QuickShark et AHMED77130 aiment ce message
AHMED77130 Lieutenant
messages : 738 Inscrit le : 10/05/2020 Localisation : France Nationalité :
Sujet: Re: Diplomatie marocaine - Relations internationales Mar 4 Oct 2022 - 19:59
replaysat a écrit:
JA: Maroc-France :
FRANCE – MAGHREB : L’ÉQUATION IMPOSSIBLE (2/4) – En juin et juillet derniers, puis à nouveau début septembre, le roi Mohammed VI passait plusieurs semaines en France. Deux mois durant lesquels le monarque, venu au chevet de sa mère que l’on dit souffrante, a séjourné essentiellement à Paris, dans une de ses résidences acquise en 2020 : un hôtel particulier situé dans le 7e arrondissement, derrière le Champ de Mars. Soit à deux pas de l’Élysée.
Pourtant, comme l’ont confirmé plusieurs sources consultées par JA, à aucun moment le souverain marocain et le président français ne se sont vus, ni appelés au téléphone.
Pas même un message protocolaire de prompt rétablissement n’a été adressé par Emmanuel Macron au roi du Maroc lorsque ce dernier, pendant cette période, a contracté le Covid – ce qu’il n’avait pas manqué de faire lorsque le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, était tombé malade, en octobre 2020. De son côté, Mohammed VI n’avait pas omis d’envoyer ses vœux de bonne santé au locataire de l’Élysée lorsque celui-ci avait été déclaré positif au coronavirus en décembre 2020.
Autant de marques d’une relation qui bat de l’aile entre les deux chefs d’État. Ce qui est plutôt un euphémisme, à en croire un ancien haut diplomate français, qui la qualifie, lui, d’« exécrable ».
Le grand malentendu
« Contrairement à ce que la France et le Maroc veulent laisser croire, il ne s’agit pas uniquement de tensions récentes autour du Sahara, ou de l’affaire des écoutes téléphoniques via le logiciel Pegasus, que Macron aurait prise comme un affront personnel, malgré les démentis du Maroc, et qu’il n’aurait toujours pas digérée, ou du contentieux sur les visas », assure cette même source.
C’est en réalité un mille-feuille d’incompréhensions entre Paris et Rabat depuis le premier mandat d’Emmanuel Macron. Après la présidence Hollande, la relation est passée de fraîche à glaciale.
Comment en est-on arrivé là ? À Rabat comme à Paris, tous soulignent l’absence de sensibilité marocaine du président français. Jusqu’à son élection en 2017, son seul contact avec le Maroc se résumait au deal Lesieur Cristal (filiale du holding royal SNI) dont il avait en partie orchestré la vente en 2011 au groupe Avril, quand il était encore banquier chez Rothschild.
Il y a aussi ces vacances passées à Tanger dans la demeure de son mentor, le milliardaire Henry Hermand – un des premiers et plus ardents soutiens de Macron, que cet homme d’affaires épris de politique (et à qui de nombreux hommes politiques, Michel Rocard en tête, étaient redevables) avait pris sous son aile dès 2002. Et il y a enfin l’amitié de son épouse Brigitte pour l’artiste-peintre marocain Mehdi Qotbi.
Désinvolture
« J’ai connu Macron bien avant qu’il ne soit au pouvoir », raconte l’écrivain franco-marocain Tahar Ben Jelloun, ami de longue date d’Henry Hermand. « Bien qu’il connaisse mal le Maroc, il n’a jamais donné suite à mes propositions de lui faire découvrir le pays et son fonctionnement. Et, de toute évidence, il n’a trouvé personne pour le conseiller à ce propos, au vu de la désinvolture avec laquelle il aborde le sujet », assure-t-il.
Aux yeux du prix Goncourt 1987, connu pour sa proximité avec le Palais, la manière dont le président français a annoncé sa venue au Maroc fin octobre, en réponse à des passants, un soir d’août à la sortie d’un concert de musique électro au Touquet, est révélatrice de sa méconnaissance des us et coutumes marocains, et diplomatiques plus généralement.
D’ailleurs, l’Académicien estime – il l’a écrit dans une tribune publiée sur un site d’information marocain – que « cette annonce est fausse. Macron n’a pas été invité au Maroc ni pour la fin du mois d’octobre ni pour après ».
De son côté, le ministère marocain des Affaires étrangères n’a ni confirmé ni infirmé un quelconque voyage présidentiel au Maroc. Et près de deux semaines après la diffusion sur les réseaux sociaux de cette vidéo filmée par des badauds en marge du Touquet Beach Festival, la visite n’a toujours pas été inscrite à l’agenda officiel du président français.
Une source élyséenne a tout juste déclaré à JA que « des négociations [étaient] en cours avec les autorités marocaines ». Elles porteraient sur le format de la visite, ainsi que sur la date. Autant dire que le projet est encore dans les limbes…
Nouvelle génération
« À moins de vouloir verser dans une forme de jeunisme digital, ce qui est très risqué avec un pays comme le Maroc, cette annonce de Macron, qui survient quelques jours à peine après son retour de voyage en Algérie, a tout d’un ballon d’essai », souligne un essayiste politique français.
Si la pratique de la Ve République a fait de la politique étrangère le domaine réservé de la présidence, c’est encore plus vrai sous Emmanuel Macron. C’est à l’Élysée que se prennent les décisions, ce qui réduit parfois le Quai d’Orsay à l’expédition des affaires courantes. Une évolution illustrée par le nombre toujours plus faible de diplomates arabisants au profit de profils technocratiques.
Une nouvelle génération de diplomates et de conseillers qui, à la différence de ceux qui entouraient les anciens présidents français de la Ve République, n’ont pas toujours la stature d’un Dominique de Villepin ou d’un Hubert Védrine.
Des critiques qu’on a souvent entendues au sujet par exemple d’Hélène Le Gal, l’ambassadrice envoyée en 2019 pour représenter la France dans le royaume et qui vient d’y achever sa mission.
« Au même titre que Washington ou Londres, Rabat a toujours été l’une des chancelleries les plus convoitées par les diplomates français, et la France, au regard de la relation privilégiée qui unit les deux pays, a toujours veillé à soigner les profils qui y sont envoyés, commente Tahar Ben Jelloun. Y placer une personnalité froide comme Hélène Le Gal montre que Macron ne comprend pas bien le Maroc, ou qu’il estime que ce n’est pas un pays stratégique. »
Sentiment antifrançais
Si les ambassadeurs ne décident pas de la ligne globale entre les deux pays, ils sont chargés de l’entretien des relations au quotidien. Or durant ses trois années en poste au Maroc, l’ex-« Madame Afrique » de François Hollande n’a pas réussi à se constituer un réseau parmi les élites marocaines ni à se faire apprécier par ses interlocuteurs au royaume, contrairement à son prédécesseur Jean-François Girault.
« Elle a cumulé les maladresses dans les médias locaux comme sur les réseaux sociaux, dans un contexte où, dans sa volonté de plaire à l’électorat de droite, Macron a réduit de moitié le nombre de visas accordés aux Marocains, avec des refus de demandes d’anciens ministres, d’universitaires, de PDG… Résultat, les Marocains qui se rendaient jusqu’alors en France pour étudier, voir leurs familles, faire du tourisme ou du commerce se tournent vers d’autres destinations pour dépenser leur argent. Et, surtout, cela alimente dans toutes les couches sociales un sentiment antifrançais jusqu’alors inexistant au royaume », explique l’auteur de La Nuit Sacrée.
Cette absence de tropisme d’Hélène Le Gal pour le Maroc est le reflet de celui de l’actuelle ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, de son prédécesseur Jean-Yves Le Drian ou même de Patrick Durel, le conseiller diplomatique du président Macron pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient.
De leur côté, le royaume et son ambassadeur en France, Mohamed Benchaâboun, n’ont pas réussi à constituer de nouveaux relais, à l’instar de ce que peuvent représenter pour l’Algérie la productrice Yamina Benguigui ou l’écrivain Kamel Daoud.
Mohamed Benchaâboun, en février 2020, à Rabat. MOHAMED DRISSI KAMILI pour JA
Le Sahara, grand sujet de discorde
Un point relevé d’ailleurs par Zakaria Garti, le président de Maan (mouvement citoyen marocain d’inspiration libérale, proche de personnalités de LaREM), dans un post en arabe sur Twitter publié le 12 septembre en réaction à la réception par le député français Jean-Paul Lecoq (Parti communiste) d’une délégation du Polisario à l’Assemblée nationale : « La montée de Macron s’est accompagnée de l’émergence d’une nouvelle technocratie qui n’a aucune connaissance des relations politiques historiques entre les deux pays », écrit-il. À cela s’ajoute, dit-il, « la faiblesse, côté marocain, d’une diplomatie parallèle et l’absence de relais au sein du nouvel establishment ».
Reste le grand sujet de discorde : le Sahara, « le prisme à travers lequel le Maroc considère son environnement international, et l’aune qui mesure la sincérité des amitiés et l’efficacité des partenariats qu’il établit » a explicité le roi Mohammed VI dans son discours du 20 août.
Un discours où il a appelé les amis traditionnels du Maroc qui ne l’auraient pas encore fait à clarifier leur position sur ce sujet, et qui a largement été interprété comme un message adressé à la France, cette dernière étant le deuxième partenaire économique du Maroc, après l’Espagne.
Or la France, dans une volonté de ménager l’Algérie – soutien historique, militaire, financier et diplomatique du Polisario – n’affiche pas de position tranchée comme celle qu’ont pu prendre récemment des pays comme l’Allemagne, les États-Unis ou encore l’Espagne.
Paris s’en tient au même discours depuis 2007, qualifiant la solution marocaine de « crédible « . Ce qui, vu de Rabat, reste insuffisant puisque le royaume aimerait voir qualifié le plan d’autonomie sous souveraineté marocaine de « solution la plus crédible ». En diplomatie comme en amour, les plus petits détails comptent. Orgueil et préjugés
« Emmanuel Macron n’apprécie pas du tout de sentir que Rabat lui force la main ou lui fait du chantage. Paris n’ira pas plus loin sur la question du Sahara, car il considère que la France a déjà une position positive par rapport à ce dossier et ne comprend pas ce que le Maroc veut de plus. Surtout, Macron a à cœur de consolider sa relation avec Alger. Pour plusieurs raisons, mais surtout car il aimerait rester dans les mémoires comme le président qui aura résolu la sempiternelle question algérienne, à laquelle tous les présidents de la Ve république se sont attelés, sans succès. La question algérienne, pour Paris, relève quasiment de la politique intérieure, au regard de la présence d’une importante diaspora algérienne en France, mais aussi parce qu’elle est très scrutée par l’opinion publique française du fait de l’histoire entre les deux pays », explique une de nos sources.
À ce « grand malentendu » sur le dossier du Sahara s’ajoutent une certaine préoccupation française quant à l’influence grandissante du Maroc en Afrique subsaharienne ainsi que la diversification par Rabat de ses partenariats stratégiques, avec des pays comme Israël, les États-Unis, l’Allemagne ou encore l’Espagne.
Mais pour le moment, realpolitik oblige, le business continue, et la coopération sécuritaire se poursuit, et une attitude de froide courtoisie est de mise des deux côtés. D’ailleurs, les uns et les autres se refusent toujours à évoquer ouvertement une « crise ». Jusqu’à quand ?
Sujet: Re: Diplomatie marocaine - Relations internationales Mar 4 Oct 2022 - 20:02
JA: France – Maghreb : Macron, Mohammed VI, Tebboune et Saïed… l’équation impossible Consciente du recul de son influence, la France a réactivé sa politique maghrébine, notamment via la visite d’Emmanuel Macron à Alger fin août. Mais, dans un contexte de grandes tensions régionales, Paris navigue en eaux troubles:
FRANCE – MAGHREB : L’ÉQUATION IMPOSSIBLE (1/4) – « Malentendu : divergence d’interprétation entre personnes qui croyaient se comprendre, ou mésentente sentimentale », nous renseigne Le Petit Robert. Deux définitions qui correspondent à l’état des relations, autrefois privilégiées, entre Paris et Rabat. Depuis que la France a décidé, il y a un an, de réduire drastiquement le nombre de visas octroyés aux ressortissants marocains, y compris à des personnalités francophiles habituées aux allers-retours entre les deux rives de la Méditerranée, l’incompréhension règne du côté du royaume.
En cause, le nombre jugé insuffisant de laissez-passer consulaires délivrés par le Maroc pour permettre l’expulsion vers le royaume de ses ressortissants frappés d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF). Le Maroc a beau répondre qu’il ne saurait accueillir des personnes qui, souvent, ne disposent pas des preuves de leur citoyenneté marocaine, Paris n’en démord pas. Voilà pour la « divergence d’interprétation ».
Quant à la « mésentente sentimentale », elle touche à la sempiternelle question du Sahara. Autrefois à l’avant-garde des soutiens du Maroc dans cette crise régionale, la France a depuis vu plusieurs pays occidentaux – États-Unis, Israël, Espagne, Allemagne – aller plus loin encore, soit en reconnaissant la souveraineté marocaine sur ce territoire disputé, soit en déclarant que le plan d’autonomie marocain constitue « la base la plus sérieuse pour le règlement du conflit ». Désormais, Rabat attend de Paris des preuves d’amour supplémentaires, comme en témoigne le discours du roi Mohammed VI du 20 août.
Les limites du « en même temps »
Problème : toute inflexion française en ce sens aurait pour effet automatique d’irriter Alger, avec qui le président français Emmanuel Macron a patiemment raccroché les wagons au terme d’une crise diplomatique de plusieurs mois. Pleinement engagé dans une politique de réconciliation historique avec l’Algérie, dont les résultats sont pour le moins incertains, Emmanuel Macron ne peut désormais faire demi-tour au milieu du gué, à moins de reconnaître l’échec de sa politique algérienne. Il a ainsi réservé à l’Algérie son premier voyage au Maghreb de son second mandat.
Dans un autre contexte, par exemple durant les années Bouteflika, lorsque la diplomatie algérienne était devenue mutique, le chef de l’État français aurait peut-être pu tenir une forme d’équilibre entre Rabat et Alger, selon la recette du « en même temps » dont il a le secret.
Mais malgré quelques signes d’apaisement de part et d’autre, c’est leur crispation croissante sur la question que donnent à voir depuis plusieurs mois les diplomates algériens et marocains. Il ne se passe pas une semaine sans que les représentants des deux « pays frères » ne se lancent des noms d’oiseau à la figure, et la perspective d’un nouveau conflit ouvert entre les deux voisins ne relève plus de la science-fiction.
Autant dire que le président français marche sur des œufs et qu’il devrait prendre soin de s’abstenir de s’exprimer sur le sujet… quand c’est précisément ce que lui demande de faire le souverain chérifien. Alors qu’une visite au Maroc d’Emmanuel Macron a été annoncée par l’intéressé lui-même après son séjour algérien, en coulisses, les négociations autour du contenu de ce voyage officiel s’annoncent des plus ardues.
La carte tunisienne
Face au recul de l’influence française dans la région au profit de nouveaux acteurs – Israël et la Turquie notamment –, le président français voit dans les évolutions du régime tunisien matière à redéployer son influence. Lâchée par les États-Unis, qui tolèrent mal la tendance autocratique croissante du président Kaïs Saïed, la Tunisie a trouvé plus de compréhension chez le président français.
Au lendemain d’un référendum constitutionnel qui n’a pas respecté les règles les plus élémentaires de tout exercice démocratique, le président français a ainsi qualifié le scrutin d’« étape importante dans le processus de transition politique en cours » et assuré le chef de l’État tunisien du soutien de Paris dans les discussions entre la Tunisie et le FMI.
Mais là encore, le contexte régional ne facilite pas la tâche de l’Élysée. Sortant de la traditionnelle « neutralité active » de Carthage sur la crise du Sahara, Kaïs Saïed a jugé bon de recevoir en personne le chef de la RASD Brahim Ghali, à l’occasion du 8e sommet de la TICAD qui s’est tenu à Tunis fin août, provoquant la prévisible colère de Rabat.
Dépendante des subsides d’Alger, la Tunisie n’est plus à l’abri des éclats occasionnés par le conflit sahraoui. Elle est désormais identifiée comme pleinement « pro-algérienne » par le Maroc.
Tout l’enjeu pour le président français est désormais de relancer la très stratégique amitié franco-marocaine, d’aboutir à une réconciliation historique avec Alger et de retrouver sa place de « parrain » principal de la Tunisie. Des objectifs que d’aucuns jugent contradictoires, voire impossibles à atteindre « en même temps » dans un tel contexte.
Sujet: Re: Diplomatie marocaine - Relations internationales Mer 5 Oct 2022 - 17:30
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En obtenant de la Somalie l’ouverture d’un consulat à Dakhla, le Maroc réussit une nouvelle percée diplomatique dans la Corne de l’Afrique, une région minée par des conflits, exposée à des crises humanitaires et aux ingérences étrangères qui demeure encore particulièrement rétive aux efforts de Rabat pour convaincre de sa souveraineté sur le territoire du Sahara occidental
Le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita a profité de son passage à New York à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations Unies pour rencontrer le ministre somalien des Affaires étrangères, Abshir Omar Jana. Celui-ci a indiqué à l’issue de cet entretien que son pays « décide d’ouvrir une ambassade à Rabat et un consulat général à Dakhla » et ajouté que Rabat et Mogadiscio « soutiennent leur souveraineté et intégrité territoriale réciproques ».
L’enjeu de cette reconnaissance mutuelle est double pour la Somalie : en échange de sa reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, elle reçoit en retour un appui franc d’une puissance régionale membre de l’Union africaine (UA) et de la Ligue arabe dans son conflit territorial au Somaliland. Cet ancien territoire britannique situé au nord du pays s’est autoproclamé indépendant en 1991, à la suite de la révolution somalienne qui a chassé du pouvoir Mohamed Siad Barre, un militaire qui a régné d’une main de fer sur la Somalie post-indépendance.
Le gouvernement de Mogadiscio revendique le Somaliland - non reconnu par la communauté internationale - comme un Etat de sa République fédérale. La Somalie voit également en le Royaume un partenaire de choix capable de soutenir son développement économique. Abshir Omar Jana a d’ailleurs annoncé qu’une feuille de route de coopération sera signée entre son pays et le Maroc. Il y a plus de deux ans, les officiels somaliens avaient exprimé leur intérêt « au renforcement de la coopération avec le Royaume en vue de bénéficier de l'expérience marocaine en matière de gestion des ressources hydriques et de dessalement d’eau de mer ». Jusqu’ici, la Somalie gardait une position de neutralité vis-à-vis du conflit au Sahara Occidental. Elle n’a jamais reconnu la ‘RASD’, l’entité du Polisario membre de l’UA et accueille même une ambassade du Maroc dans sa capitale. Elle devient alors le 22ème pays africain à ouvrir un consulat en territoire du Sahara occidental.
Le best practice du Maroc à Djibouti
Mais la Somalie n’est pas le premier Etat de la Corne de l’Afrique à se doter d’une représentation consulaire à Dakhla ou Laâyoune. Début 2020, la République de Djibouti voisine ouvrait un consulat à Dakhla. Une opération rendue possible grâce au soft power économique du Maroc sur le continent africain. En décembre 2020, nous révélions que le Maroc n’hésitait pas à délier les cordons de sa bourse en échange de consulats étrangers au Sahara. A Djibouti en l’occurrence, l’entreprise du BTP, Somagec avait signé un contrat pour « la mise en place et le développement d’une jetée pétrolière dans le parc industriel de Damerjog », quelques mois avant l’inauguration du consulat général djiboutien à Dakhla. Un an plus tard, Somagec renforçait sa présence dans ce petit d’Afrique de l’Est en décrochant un contrat pour la construction d’un terminal de stockage dans le même parc industriel de Damerjog.
Le no man’s land diplomatique érythréen
Plus au nord, l’Érythrée, en conflit historique avec l’Ethiopie, reste une terre vierge pour la diplomatie marocaine. La dernière rencontre entre officiels des deux pays remonte à mars 2017, lorsque le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Salaheddine Mezouar, avait reçu à Rabat son homologue érythréen, Mohammed Osman Saleh, qui lui a remis un message adressé à Mohammed VI par le président Isaias Afwerki. Dans un document fuité par le corbeau ‘Chris Coleman’, la direction des Affaires africaines au ministère des Affaires étrangères affirmait que « les relations économiques et de coopération entre le Maroc et l’Érythrée sont pratiquement inexistantes ». Dix ans plus tard, force est de constater que les choses n’ont quasiment pas évolué depuis. Il faut dire que Rabat ne voit pas en Asmara un point urgent dans son agenda extérieur. L’Erythrée n’a jamais reconnu la ‘RASD’ et n’entretient pas de dialogue avec les séparatistes du Polisario. Mais le Maroc peut (toujours) mieux faire. « L’Erythrée souhaite développer la coopération bilatérale sur tous les plans, notamment dans les domaines des pêches maritimes et de la marine marchande, de l’agriculture, du commerce, du tourisme et de la formation des cadres », lit-on justement sur le document leaké par ‘Chris Coleman’, et dont le contenu n’a jamais été démenti par les autorités marocaines.
Le casse-tête éthiopien
Mais c’est à Addis-Abeba que se trouve le réel défi dans la zone de la Corne d’Afrique. L’Ethiopie a reconnu la ‘RASD’ en 1979 et accueille même son ambassadeur permanent. L’héritage éthiopien en matière de soutien à l’autodétermination des peuples et à l’indépendance compliquent la mission d’influence sur l’opinion publique locale. La présence du siège de l’Union africaine - qui a accordé un siège de membre à la ‘RASD ‘en 1982 - dans la capitale éthiopienne rendent la tâche quasi-impossible, tant qu’il n’aura pas décroché la révision du statut de l’entité du Polisario au sein de l’instance africaine. Pour ce faire, il doit rassembler deux tiers des membres de l’organisation pour obtenir une révision de l’Acte constitutif de l’UA et prétendre, éventuellement, à expulser la ‘RASD ‘de l’Union.
Les rapports entre Rabat et Addis Abeba se sont intensifiés depuis la visite discrète de Mohammed VI dans la capitale éthiopienne, en 2016. A l’époque, le Royaume préparait son retour au sein de l’UA et la visite du monarque était censée donner un coup d’élan aux échanges commerciaux entre le Maroc et cette puissance régionale, presque inexistants à l’exception du commerce d’engrais. Le pays d’Haïlé Selassié est l’un des principaux clients du géant marocain du phosphate, OCP, sur le continent africain, qui y a ouvert une filiale en 2015 déjà. Depuis, le groupe investit massivement. Son projet d’usine d’engrais dans la zone industrielle de Dire Dawa, attendu depuis 2016, doit illustrer cet intérêt particulier du soft power économique marocain pour l’Ethiopie.
En revanche, le récent rapprochement entre Addis Abeba et Alger, dans le cadre du nouveau G4 africain - rassemblant également le Nigéria et l’Afrique du Sud - compromet les efforts de séduction du Maroc vis-à-vis de l’Ethiopie. Fin août, le premier ministre Abiy Ahmed Ali a effectué une visite officielle dans la capitale algérienne au cours de laquelle il a rencontré le président Abdelmadjid Tebboune. « L’industrie agro-alimentaire, l’industrie pharmaceutique, la recherche scientifique et l’enseignement supérieur », avaient été mentionnés comme sujets de discussion dans le communiqué officielle publié à l’issue de l’entrevue. Les deux pays souhaitent former un bloc d’influence couvrant la totalité du territoire africain. L’objectif : contrecarrer le reste des puissances régionales telles que l’Egypte et le Maroc.
Un théâtre de conflits perpétuel
Il faut surtout garder à l’esprit que cette région du continent est la scène de plusieurs conflits frontaliers et de guerres civiles qui en font l’une des plus volatiles du monde. Le Soudan et l’Ethiopie ne sont jamais parvenus à trouver un accord sur le tracé de leurs frontières communes et se disputent des terres fertiles de la région d’Al Fashaga. Des heurts s’y produisent toujours régulièrement, malgré de nombreuses tentatives de négociation. Le Sud-Soudan nouvellement indépendant se cherche une destinée diplomatique et se voit tiraillé dans ses positions à l'égard du Maroc. Plus au sud-est, la Somalie et le Kenya revendiquent une zone maritime de près de 100 000 km2, très riche en poissons et en hydrocarbures. La guerre civile qui s’enlise au Tigré, la sécheresse et les risques d’insécurité alimentaire qu’elle engendre - 22 millions de personnes dans la Corne de l'Afrique vont souffrir de la famine, estimaient les Nations Unies en août dernier - rendent la région particulièrement propice aux manœuvres diplomatiques. Dans ce contexte, le Maroc active certains leviers d’influence (comme on l'a vu récemment avec Nairobi) pour assoir sa présence auprès des gouvernements locaux, notamment en matière d’intermédiation et d’aide humanitaire.
Déjà Rabat tente de trouver sa place parmi les puissances étrangères présentes sur le terrain. Outre la France, les États-Unis, le Japon, l’Italie et la Chine qui possèdent chacun une base militaire à Djbouti, « les pays du Golfe s’affrontent au Yémen et ont trouvé dans la Corne de l’Afrique des bases-arrière pour mener cette guerre (à Assab en Érythrée, puis à Socotra au Yémen) », expliquait en avril dernier Sonia Le Gourelliec, docteure en sciences politiques et chercheuse à l'Institut de Recherche Stratégique de l'Ecole Militaire entre 2014 et 2018. « Ces luttes d’influence passent aussi par le contrôle des ports de la mer Rouge. Après avoir été renvoyés de Djibouti, les Émirats arabes unis ont réhabilité les ports d’Assab en Érythrée et de Berbera au Somaliland », ajoute la spécialiste. C’est dans ce contexte que le Maroc avance lui aussi ses pions sur cet échiquier volcanique : Après Bouchaib Arroub en 2017, fin août, le chef de l’armée djiboutienne était reçu à Rabat par l’Inspecteur général des FAR, Belkhir El Farouk.